Les aventures de Harry Zona

Harry est un individu qui a été jeune il y a bien longtemps, qui habite dans le canton de Neuchâtel, en Suisse. Comme de nombreux individus de cet âge, il a des ennuis de santé, mais dans l’ensemble il jouit d’une existence plutôt agréable et confortable.

Un vendredi d’octobre, en fin d’après-midi, Harry ressent une légère irritation au front, comme un léger coup de soleil sur la droite. Le lendemain, la sensation de brûlure était un peu plus forte, et il se rend à la pharmacie pour demander un avis autorisé. Il soupçonne un zona, et il sait que ce virus doit être traité aussi tôt que possible.

Le pharmacien consulté ne pouvait pas poser de diagnostic, mais proposa à Harry une pommade calmante, soi-disant ne contenant pas de de cortisone, – réputée néfaste en conjonction avec un zona – , mais qui s’avéra en contenir tout de même. Mais Harry restait sur un doute sur la conduite à tenir, et on lui conseilla une des rares permanences médicales ouvertes le samedi dans le canton de Neuchâtel, celle des Cadolles. Elle est tenue par admed, une entreprise du canton de Neuchâtel en difficultés financières notoires.

Harry se rendit dans cette permanence en fin de matinée du samedi, et après une longue attente, finit par être reçu au milieu de l’après-midi par une doctoresse qui l’examina sommairement, lui posa deux ou trois questions et lui dit en substance qu’il souffrait d’une piqûre d’insecte ou d’une allergie. Harry insista en demandant s’il ne s’agissait pas d’un zona, et obtint la réponse péremptoire et un peu sèche suivante :  » Non, non, cela ne vous fait pas assez mal pour que ce soit un zona, c’est probablement une allergie ». Et elle lui remit une ordonnance avec des anti-hystaminiques en dose massive, une pommade à la cortisone, et un anti-inflammatoire. Harry était très sceptique, car un diagnostic posé sur la simple indication de douleur, forcément subjective, du patient lui semblait un peu léger, et en tous cas dénué de toute démarche scientifique. Mais dans l’impossibilité d’obtenir un autre diagnostic, et une autre ordonnance, il se sentait obligé de se contenter de cela. Il était de toutes façons trop tard dans l’après-midi pour tenter de trouver un autre avis et une autre ordonnance, et Harry répugnait à se rendre aux urgences pour ce genre de problèmes. Harry rentra donc chez lui, mais avec une confiance quelque peu limitée en la pertinence du diagnostic, et se demandant si le traitement qui lui avait été prescrit était judicieux.

Le dimanche, Harry rencontra des amis; son front le brûlait toujours malgré la pommade, mais la douleur ressentie était suffisamment modérée pour permettre à Harry de plaisanter avec ses amis. En revanche, le lundi, la situation s’était fortement détériorée, son oeil droit était pratiquement fermé; la douleur n’était pas excessive, mais l’aspect le poussa à se rendre dans une autre permanence, un établissement qu’il avait déjà fréquenté par le passé, mais qui était malheureusement fermé le samedi, et là, un médecin identifia un zona avant même que Harry ne puisse lui dire bonjour. Il lui prescrivit immédiatement un médicament virostatique et lui dit que dans les 48 ou 72 heures, le problème serait réglé.

Sauf que le zona est un virus ayant une action complexe, et qui a des effets au-delà de sa période active; ce virus est de la famille des virus comme l’herpès ou la varicelle; tout le monde ou presque en est porteur, mais il s’active assez rarement, heureusement. Quand il s’active, il endommage les nerfs; il est donc vital de le traiter le plus tôt possible afin de limiter les dommages.

Un nerf endommagé envoie des signaux contradictoires au cerveau, qui interprète ces signaux comme de la douleur ou au mieux comme une démangeaison intense, voire les deux simultanément. Les nerfs ont la particularité de se réparer très lentement; un zona peut donc occasionner des douleurs difficilement tolérables plusieurs mois voire plusieurs années après que le virus ait été inactivé. Plus l’inactivation est rapide, plus la durée des douleurs sera brève; une attente de deux jours peut impliquer plusieurs mois de douleurs supplémentaires. Le diagnostic erroné de la doctoresse à la permanence d’admed n’est donc pas innocent. Il est même incompréhensible à certains égards. Se fonder sur l’impression de douleur ressentie par le patient, donc sur une information largement subjective, ne constitue pas une démarche scientifique, d’autant que les premiers symptômes du zona ne sont guère douloureux. Par ailleurs, il semble d’après divers avis que le diagnostic du zona ne soit pas très compliqué à réaliser de manière parfaitement objective; mais là, je ne puis être catégorique, bien sûr.

Harry Zona avait parfaitement réagi aux premiers symptômes; il a eu le tort de faire confiance à un diagnostic erroné et injustifiable. On peut dire qu’il a fait tout juste, mais que le médecin de la permanence (qui seul pouvait lui prescrire un virostatique) a quant à lui fait tout faux.

La morale de cette histoire ? Errare humanum est, bien sûr; mais il est des erreurs qu’un professionnel ne devrait pas commettre. De toutes façons, un diagnostic posé sur une information potentiellement subjective constitue une inadmissible erreur qui pourrait s’avérer grave. Et dans le doute, la responsable de ce diagnostic eût dû prendre un avis de tiers, sur une base photographique, par exemple; ou éventuellement prescrire un virostatique à titre préventif, pour la durée du congé dominical, en imposant un contrôle additionnel le lundi. Dans le doute, la prescription d’une pommade à base de cortisone est une hérésie, car la cortisone constitue un véritable booster pour le virus du zona. Actuellement, trois mois plus tard, les douleurs sont toujours suffisamment gênantes pour troubler le sommeil de Harry Zona, et lui pourrir l’existence, ainsi que celles de ses proches, en raison de la dégradation de son humeur, et de son irascibilité sccrue.

S’il vous arrive de ressentir une sensation de brûlure – comme un coup de soleil – localisée sur le corps, insistez pour obtenir un dagnostic précis, car le zona est semble-t-il assez facile à identifier de manière précise et infaillible, par un praticien compétent bien sûr. Mieux encore, faites-vous vacciner ! Ce n’est pas coûteux, ni douloureux, et cela vous évitera de longs mois, voire davantage, de douleurs et d’inconfort.

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